Fin de vie des enfants et des adolescents polyhandicapés en établissements médicosociaux

Enquête nationale multicentrique et rétrospective de pratiques, réalisée en 2015 auprès de 258 établissements disposant de places agréées polyhandicap pour identifier les pratiques d’accompagnement de fin de vie au sein des établissements médico-sociaux accueillant des enfants et adolescents polyhandicapés, connaître les ressources dont disposent les professionnels de ces établissements et celles qu’ils sollicitent, présenter les problématiques rencontrées par ces professionnels sur le terrain.

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Rencontre-thématique du 22 septembre 2016

C’est une salle quasiment comble qui a assisté à la quatrième rencontre-thématique intitulée :

La communication dans les actes de soin.

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Le Pr Emmanuel HIRSCH a introduit la séance en rappelant qu’il faut aller à la rencontre de l’autre mais que chacun d’entre nous n’est pas forcément en capacité de communiquer. Communiquer est une manière d’être ; l’éveil de l’autre dans son étrangeté est très important. L’enjeu fondamental de la communication dans les actes de soin passe par l’instauration d’une confiance entre l’équipe médicale et le patient. Pour avoir confiance en l’équipe médicale, le patient doit avoir le sentiment d’être compris.

Lévinas a dit : il y a le dit et le dire.  Il y a une manière de dire et de suggérer. Il y a différents temps et différents moments. Ce qui est le plus important dans l’annonce (de la maladie ou du handicap), c’est trouver le juste moment : on ne communique pas de la même manière à tous instants, il y a des moments de plus grande proximité ; il y a des moments où l’on peut dire les choses et d’autre où ce n’est pas possible ; il faut beaucoup d’intelligence, de retenue, de pudeur et de décence pour communiquer. Il faut avoir le sentiment de la mesure : à travers quels signes, relations, la personne est-elle réceptive ? Comment comprendre que ce qu’on dit est exactement ce qu’on voulait dire ?

Dr Zucman :  la communication est fondamentale pour toute personne humaine. C’est le plus important des désirs que nous ayons comme être vivant. Communiquer est un acte très complexe car il n’est jamais seul : on communique avec autrui. Il faut être ensemble pour communiquer : la personne elle-même, l’équipe, les parents. Pour communiquer, le premier point est d’être ensemble à chaque fois que c’est possible alors qu’on a plutôt tendance à mettre la personne polyhandicapée en dehors de la communication. Pourtant, c’est du mieux-être pour tous car prendre une décision, annoncer une intervention nécessaire… lorsque la personne polyhandicapée est présente, nous prenons mieux le temps. En prenant le temps, obligatoirement notre langage est différent.

La communication est toujours interactive. Communiquer est une action complexe pour le commencement : cela demande qu’on commence par écouter. En tant que professionnel, chargé de dire les choses :

  • Il faut écouter d’abord
  • Laisser à l’autre tout le temps de comprendre
  • Répondre en dernier lieu

Il existe des freins à la communication :

  • Le temps : il faut trouver des plages de communication régulières avec eux, hors urgences. Il faut qu’un même membre de l’équipe passe régulièrement ce moment privilégié journalier avec la personne
  • Nos peurs : de ne pas les comprendre, de ne pas être compris (pourtant elles comprennent au-delà de ce que nous pouvons espérer)

La communication entre nous (parents, professionnels, personne polyhandicapée) repose sur un malentendu. Les médecins ont tendance à ne pas partager leur savoir et demandent le savoir des autres membres de l’équipe et le savoir qu’ont les personnes polyhandicapées sur nous. Le savoir est un pouvoir. La Loi Kouchner impose l’obligation de soigner, d’expliquer les troubles, les traitements. Il faut partager ce qu’on croit savoir, partager les questions qu’on continue de se poser, oser dire « je ne sais pas » ou « je ne sais pas répondre ».

Si on veut parler des troubles et des traitements, il faut s’affranchir, dans les équipes, du secret médical mais les règlements imposent une obligation de réserve rigoureuse par rapport à ceux qui ne sont pas concernés.

Le mieux-être des trois partenaires repose sur la confiance mutuelle. C’est un pouvoir partagé, « empowerment », c’est-à-dire donner du pouvoir à l’autre, c’est partager son savoir.

La communication constitue ainsi un acte de soin (care) et cela donne à chacun un pouvoir nécessaire, se sentir exister et c’est le but principal. Cela cimente aussi une équipe et c’est le meilleur moyen de lutter contre l’isolement des familles, de certains de ceux qu’on accueille et qui luttent contre l’épuisement professionnel (burn-out).

Samira NOUALI : l’Accompagnant Educatif et Social (A.E.S.) exerce une fonction d’accompagnement et d’aide dans la vie quotidienne, à la frontière de l’éducatif et du soin. Il doit être doté de qualités spécifiques et adhérer à certains concepts de la relation d’aide, comme la présence, l’écoute, le respect et l’empathie et posséder un grand sens moral et éthique et exerce sa profession en s’interrogeant sans relâche : Que dois-je faire face à cette situation ? Qu’aurais-je dû faire ? Qu’est-ce qui serait bien pour la personne accompagnée ?

L’amélioration de la qualité est une préoccupation majeure de la politique générale de l’établissement et se décompose en quatre grandes catégories : l’accueil, la vie quotidienne, l’animation, la rééducation et les soins.

La Loi Kouchner du 4 mars 2002 mentionne que l’usager est au cœur des préoccupations de l’hôpital public. Les droits de l’usager doivent être portés à la connaissance de chaque personne hospitalisée. Ils comprennent le droit à l’accès aux soins pour tous, sans discrimination de quelque nature que ce soit, le droit d’être informé et de participer aux décisions, l’accès aux informations de santé (dossier médical) et le respect de l’intimité et de la vie privée.

Le partage d’informations est très certainement bénéfique pour la personne polyhandicapée, sa famille et les équipes. Il permet d’accompagner au mieux professionnellement les usagers, au quotidien, tout au long de leur vie même si, parfois, le partage d’informations avec ces personnes est complexe : « que dire ou ne pas dire ? ».

Au quotidien, les professionnels informent les résidents de tout ce qui les concerne, de ce qui va se passer, des actes médicaux programmés et des activités prévues. Ils recueillent alors leur consentement, ou non, pour tous ces moments de vie. Les résidants savent d’ailleurs très bien se faire comprendre si on les écoute et les observe. Le résidant doit être sujet et acteur de sa vie.

La relation avec les parents est très souvent réciproque et complémentaire : le parent sait. Les professionnels apprennent d’eux et inversement ! Pour le bien-être de leur enfant, c’est primordial.

L’obligation de réserve : dans le cadre des communications dans les pratiques de soin s’établit un véritable partenariat fondé sur la confiance entre la personne polyhandicapée, sa famille et les équipes. Un partage d’informations se met en place et l’AES est soumis à une obligation de réserve, à une discrétion professionnelle, voire au secret médical, s’agissant des échanges avec les familles. L’AES détient des informations d’ordre médical et familial qu’il partage seulement dans le cadre de l’équipe pluridisciplinaire. L’obligation de respecter le secret professionnel est le corollaire du droit du patient au respect de son intimité et de sa vie privée.

Manuel COL, parent : La problématique de communication entre les parents et le médecin : ce dernier doit sentir si le parent est en capacité d’entendre la nouvelle. Certains mots sont lâchés sans autres explications.

Il rappelle aussi combien il est important que les soignants fassent attention à l’enfant (en lui disant bonjour par exemple).

Quand le polyhandicap est dépassé, l’enfant redevient un enfant comme les autres.

Les médecins mesurent-ils toujours l’impact des paroles qu’ils peuvent dire aux familles ? M. COL mentionne qu’il y a de bonnes relations avec certains professionnels car ils ont la communication en eux. Leurs études ne suffisent pas. L’empathie ne s’apprend pas. Certains professionnels ont su faire leur mea culpa. M. COL rajoute que les médecins, même s’ils sont les sachants, devraient apprendre à dire « je ne sais pas », loin de faire peur aux parents, cela pourrait les rassurer.

Il rajoute que les soignants qui prendront le temps pour s’occuper de son enfant auront tout à y gagner et cela peut faire du bien collectivement.

Un compte rendu complet sera publié dans le prochain GPF INFO à l’attention de nos adhérents.